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s’avança donc dans l’île, suivant la lisière d’une forêt. Par-dessus le casque, il avait jeté une cape. Il arriva à un endroit où il y avait quelques domestiques qu’accompagnaient de grands chiens de pâtre. Il lia conversation avec eux et leur demanda d’où ils étaient et pour quelles raisons ils se tenaient là, avec d’aussi grands chiens.

Ils répondirent : « Il faut croire que tu ne sors jamais de chez toi pour ne pas avoir appris que dans cette île se tient un ours, un terrible malfaiteur ; il tue les gens et les bêtes et sa tête est mise à prix. Chaque nuit, nous surveillons ici, à Aski, notre bétail enfermé dans des enclos. Mais pourquoi te promènes-tu en armes pendant la nuit ? »

Egil dit : « Moi aussi, j’ai peur de l’ours, et peu de gens, je pense, sortent maintenant sans être armés. L’ours m’a longtemps harcelé cette nuit. Tenez, voilà qu’on l’aperçoit ; il est là, dans la saillie de la forêt. Est-ce que tout le monde dort dans la ferme ? »

Un des domestiques répondit que Bergönund et Frodi devaient encore être en train de boire. « Ils font cela des nuits entières. ».

« Alors dites-leur, » reprit Egil, « où est l’ours ; moi, je m’empresse de rentrer chez moi. »

Il s’éloigna donc, pendant que le domestique courait à la ferme et entrait dans la salle où l’on buvait. Il se faisait que tout le monde était allé coucher, sauf les trois, Önund, Frodi et Hadd. Le domestique leur dit où était l’ours. Ils saisirent leurs armes, suspendues à côté d’eux, se précipitèrent dehors et coururent vers la forêt. Celle-ci s’avançait en saillies et certains endroits étaient couverts de broussailles. Le domestique leur indiqua dans quelles parties des broussailles l’ours s’était montré. Voilà qu’ils virent des branches remuer et ils en conclurent que l’ours devait se trouver là. Alors Bergönund engagea Hadd et Frodi à aller se poster en toute hâte entre le fourré et la grande forêt et veiller à ce que l’ours n’approchất de la forêt. Bergönund s’élança vers le fourré. Il portait un casque et un bouclier, une épée à la ceinture et la lance à la main. C’était Egil qui se dissimulait là, dans les broussailles, et non pas un ours. En voyant où se tenait Bergönund, il tira l’épée. À la poignée était fixé un anneau qu’il se glissa dans le bras, laissant pendre l’arme. Ensuite, il