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Fridthjof, de venir en ces lieux sans autorisation de mes frères et d’attirer ainsi sur toi la colère du dieu ? »

« Quoi qu’il en soit », répondit Fridthjof, « je fais plus de cas de ton amour que de la colère des dieux ».

Ingibjörg reprit : « Soyez les bienvenus ici, toi et tous ceux qui t’accompagnent ».

Ensuite elle lui présenta un siège, le fit asseoir à côté d’elle et but en son honneur le meilleur vin[1] ; et ils étaient assis et causèrent ensemble. Alors Ingibjörg aperçut le précieux anneau que Fridthjof portait au bras et lui demanda si ce joyau lui appartenait. Fridthjof affirma qu’il était à lui. Elle vanta beaucoup l’anneau. « Je veux te donner cet anneau », dit Fridthjof, « si tu promets de ne pas t’en dessaisir et de me le renvoyer quand tu ne voudras plus le posséder ; et sur ce gage nous nous promettons fidélité l’un à l’autre[2] ». Avec ce vœu ils échangèrent leurs bagues.

  1. Les Germains, selon Tacite (Germ. 4 : Minime sitim aestumque tolerare etc.) supportaient mal la soif. Il en était de même des Scandinaves. Ils dédaignaient l’eau. La boisson ordinaire était la bière (öl, bior) et l’hydromel, dont se délectaient aussi les dieux du Walhalla. Les gens pauvres buvaient le lait écrémé et une infusion de gruau d’avoine et de farine. Le vin, venu de Germanie et d’Angleterre, était réservé aux membres de la famille royale, aux grands dignitaires et aux riches. Parmi les dieux, Odin seul avait le privilège d’en boire. Cf. K. Weinhold, op. c. pp. 151-156.
  2. L’échange d’anneaux ou de bagues, correspondant au serment de fidélité et constituant l’acte des fiançailles, est un usage antique très répandu. Déjà l’ancienne Edda en fait mention (Rigsmál, 20, V). Ici encore Fridthjof se soucie fort peu des coutumes et des obligations traditionnelles. En effet, régulièrement, il fallait que le tuteur légal (giptingarmadr) donnât son consentement en présence du prétendant et que l’accord fut conclu devant témoins : conditions indispensables pour que le contrat eût force de loi. Aucune femme ne