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Les enfants du roi étaient encore en bas âge lorsque leur mère mourut. Or, à Sogn vivait un généreux bóndi[1] du nom de Hilding. Celui-ci offrit de recueillir la princesse sous son toit. Elle y fut élevée dignement et avec soin, et on l’appelait Ingibjörg la Belle. Fridthjof reçut également l’éducation sous la tutelle du fermier Hilding. Il devint ainsi « le frère nourricier[2] » d’Ingibjörg, et tous deux se distinguaient parmi les autres enfants.

  1. Autrefois búandi, de búa, posséder ou diriger une propriété, une ferme (). Le bondi est un propriétaire libre qui administre son domaine en toute indépendance, sans être astreint au paîment d’un tribut. Les bóndr occupent un rang social nettement opposé, d’un côté, aux serviteurs non libres (thraelir ; cf. ch. VI, n. 14) et, de l’autre, aux personnes qui revêtent dans le pays ou à la cour du roi une dignité supérieure, comme les hersar et les jarlar (cf. ch. VII, n. 10 et 11). Ils forment, comme les hommes libres chez tous les peuples germaniques, le vrai noyau du peuple, prennent part aux délibérations officielles et portent les armes pour la défense du pays. Ils correspondent à peu près aux yeomen anglais.
  2. Rarement l’éducation se faisait dans la maison même des parents. Le plus souvent ceux-ci plaçaient l’enfant dès son jeune âge, pour y être élevé et instruit, dans des familles quelquefois de rang inférieur, mais attachées à eux par la parenté ou l’amitié. Entre le pére nourricier (fóstri, fóstrfádir) et la mère nourricière (fóstra) d’une part, et l’enfant adoptif (fóstr) de l’autre, il se nouait ordinairement des liens très étroits d’attachement. Deux garçons élevés sous le même toit devenaient fóstbródir ; deux enfants de sexe différent s’appelaient fóstrsyskin. Ces mots se retrouvent à peu près tous avec le même sens dans les langues scandinaves modernes (Fosterbarn, Fosterbroder, Fosterdotter, Fosterfader, etc.). Les enfants qui recevaient ainsi dans la même maison une éducation commune concluaient volontiers pour toute la vie un pacte d’amitié fraternelle (fóstbródralag) accompagné de cérémonies mystiques dont on peut lire la description au chapitre VI de la Gísla saga Súrssonar (Éd. F. Jónsson, Halle 1903, p. 14). Cf. H. Paul : Grundriss d. germ. Phil. III2, pp. 415-417. K. Weinhold : Altnordisches Leben (Berlin 1856), pp 285-290. — De semblables cou-