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question. P. E. Müller, dans son introduction à la saga de Fridthjof, s’exprime ainsi : « Les nombreux chants poétiques qui interrompent si agréablement la prose, ont, avec le récit, un rapport si étroit qu’ils ne sont pas seulement destinés à donner du relief et de la vie à celui-ci, mais qu’ils en constituent véritablement la base ». C’est également l’avis de W. Leo (Die Sage von Fr., p. viii), J. C. Poestion (Fr. saga, p. xi) et Ph. Schweitzer (Gesch. d. altskand. Litt., p. 82). Sophus Bugge (Studier… I, p. 285) est moins catégorique quand il attribue aux divers chants de la saga un âge et un caractère différents. W. Calaminus enfin (Zur Kritik… p. 65) partage à ce sujet les idées de Müller et de ses partisans en se basant principalement sur ce fait que « tant par leur forme que par leur contenu les strophes de la saga font, au point de vue de la naïveté, de la simplicité, du naturel, la même impression que la prose ». Bref, nous sommes autorisés à croire que l’histoire de Fridthjof a primitivement revêtu la forme poétique qu’elle a conservée jusqu’au jour où elle a été mise par écrit grâce à l’introduction d’une écriture plus maniable que les vieilles runes. L’auteur de cette rédaction a emprunté à la tradition orale ces nombreux chants versifiés qui ne sont ainsi que des débris, des restes de l’ancienne poésie populaire.

À ce sujet le doute n’est plus guère possible. Dans les chapitres essentiellement poétiques, là où le récit s’écarte de l’ornière habituelle pour prendre subitement de l’envergure, dans les situations pathétiques où apparaissent une inspiration et une émotion qui contrastent avec le ton ordinaire, calme et régulier de la saga, ce sont les strophes qui dominent. Les chapitres VI, VII, IX, X ne constituent réellement qu’un assemblage de poésies entre lesquelles la prose occupe une place toute