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émises à ce sujet. « Le style de ce beau récit », dit P. E. Müller (Saga Bibl. ii, Einleitung), « semble trahir la fin du xiiie ou le commencement du xive siècle, bien que certains traits, comme l’expression trülofa (= promesse de fidélité, fin du ch. iv[1]) appartiennent à une époque postérieure. La plupart des tableaux, par contre, ont en eux quelque chose de si naïf, de si antique qu’ils ne peuvent pas avoir été composés au temps du christianisme ». Th. Möbius (Ueber die altnordische Sprache, 1872) et Ph. Schweitzer (Gesch. d. altskand. Litt.) font remonter la saga au milieu du xiiie siècle. H. Falk (Arkiv för nordisk filologi vi) et L. Lársson (Fr. saga, p. xix) la placent, comme Müller, à la fin du xiiie ou au commencement du xive siècle. F. Dietrich (Altnord. Lesebuch, p. xxx) et W. Calaminus (Zur Krit. u. Erkl. d. altn. Fr. s., p. 58) sont d’accord pour la faire naître à une époque antérieure au xive siècle et invoquent à l’appui de cette opinion diverses considérations dont il serait difficile de contester la justesse et la solidité. En effet, dès le xive siècle, les romans de chevalerie, venus surtout de France, pénétrèrent dans les pays scandinaves et y conquirent une faveur exceptionnelle attestée par les nombreuses versions entreprises à cette époque sur l’initiative de la reine Euphémie, épouse de Hákon Magnússon, qui régna en Suède de 1299 à 1319. Ces histoires d’aventures, dans lesquelles très souvent la fadeur le dispute à l’invraisemblance, amenèrent dans le goût du peuple une transformation rapide, correspondant à une réelle décadence de l’idéal esthétique et littéraire. On se passionna bientôt pour ce genre nouveau et dès lors — conséquence fatale — il se révéla au sein de la nation une indifférence marquée, un

  1. De même que le mot brot dans le sens de crime (fin du ch. V).