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temps et était devenu, pour cette raison, fort célèbre. » La saga même de Fridthjof rapporte les noms de deux de ses fils, à savoir Gunnthjof et Hunthjof et fait allusion à l’existence d’autres enfants (cf. ch. xii). L’autorité de la saga de Gautrek — hâtons-nous de le dire — est loin d’être incontestable et, au point de vue chronologique, les informations ci-dessus ne s’accordent point avec celles de la saga de Fridthjof. W. Kanisch, dans sa très savante étude sur cette saga (Berlin 1900, pp. lxxxix à xcii), — pour diverses raisons qui ne manquent certes pas de solidité — élève des doutes sur le caractère historique de tous ces rois norvégiens de la famille de Fridthjof et dont le nom se termine par — thjof. Cependant, sans apporter de véritable preuve à l’appui de l’historicité du héros, la saga de Gautrek vient du moins ajouter une présomption nouvelle à toutes celles qui nous permettent de croire que Fridthjof n’est pas une pure fiction poétique. Dégagées des nuages de la légende, les plus belles figures de la poésie épique — jusqu’au Siegfried des Nibelungen — sans rien perdre de leur prestige séculaire, finissent par descendre au rang de simples mortels en chair et en os. Pourquoi Fridthjof, dont l’histoire est de date plus récente, dont on connaît si bien la patrie, dont une partie de la vie est racontée jusque dans ses détails, dont on énumère les ascendants et les descendants en toute sincérité et sans autre raison que celle de fournir quelques informations historiques supplémentaires, dont les exploits et les aventures se rattachent d’une manière si étroite à des régions et à des localités nettement déterminées et que l’on rechercherait volontiers toutes sur la carte de la Norvège, pourquoi Fridthjof serait-il une pure création intellectuelle ? Un héros sorti de l’imagination du poète n’a pas ces contours précis et ne parvient guère à conquérir une aussi grande vogue.