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tempérament fier, hardi, fougueux, mais dont l’opiniâtreté indomptable s’allie si bien avec la loyauté et la galanterie, il est nécessaire de relire la vieille saga du xiiie siècle. C’est là que le lecteur retrouvera, dépourvus de tout embellissement factice, les rudes caractères d’autrefois ; il y observera, dans des peintures d’un réalisme suave, une abondante variété de scènes d’une vie étrangement aventureuse ; il assistera à l’âpre et héroïque poursuite d’un idéal dont il nous est difficile de saisir de prime abord le fondement, le sens et la grandeur ; il s’étonnera enfin de la bizarrerie des anciennes traditions et habitudes, et des aspects inattendus qu’offre à l’esprit non prévenu la vie publique et privée telle que nous la voyons, il y a dix siècles, dans les pays du Nord.

Il en est de l’histoire de Fridthjof comme de tant d’autres qu’a vues éclore l’époque classique de la littérature islandaise. Elles captivent petit à petit, elles attirent invinciblement par le charme spécial inhérent à cette manière de raconter si simple, si austère, si énergique ; elles plaisent par l’originalité des idées, des mœurs et des coutumes ; elles forcent l’admiration par la grandeur des caractères, qui se traduit par un dévoûment sans bornes, une inébranlable fidélité à la foi jurée ou à la parole donnée, une énergie indomptable dans la lutte, un souverain mépris des dangers et de la mort. Les scènes qui se déroulent rapides, imprévues, originales, et dans lesquelles la rudesse primitive n’exclut pas la douceur et la délicatesse des sentiments, frappent vivement l’imagination, et les noms de Fridthjof et d’Ingibjörg sont de ceux qui restent gravés dans la mémoire.

Dans la plupart des sagas, les événements sont groupés par ordre chronologique autour d’un ou de plusieurs personnages principaux, et certains chapitres offrent une