Page:La Revue hebdomadaire, Octobre 1908.djvu/218

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Ah ! mais nous ne jouons pas les maximes, repartit le Chat Maltais. C’est le jeu que nous jouons, et nous possédons l’incontestable avantage de le connaître, le jeu. Réfléchissez donc d’une enjambée, Shiraz. En deux semaines nous sommes partis de rien pour décrocher la seconde place contre tous ces gaillards que vous voyez là sur le terrain, et cela, parce que nous jouons avec la tête tout autant qu’avec les pieds.

— N’empêche que je me sens aussi mal en forme que mal en train, déclara Cendrillon, une jument gris souris, qui possédait un frontal rouge et la paire de jambes la plus nette qu’on vit oncques à un poney hors d’âge. Ils ont le double de notre taille, ces personnages-là.

Cendrillon regarda l’assemblée, et soupira. Le terrain de polo d’Umballa, dur et poudreux, était encadré de milliers de soldats, blancs, noirs, sans compter les centaines et centaines d’équipages, de mail-coachs, de dog-carts, d’ombrelles aux couleurs brillantes, d’officiers avec ou sans uniforme, et les foules d’indigènes derrière eux ; et les ordonnances à dos de chameau, qui avaient fait halte pour assister à la partie, au lieu de porter les missives du haut en bas de la ville ; et les marchands de chevaux indigènes qui couraient de côté et d’autre sur des juments de Biluchi aux oreilles délicates, cherchant l’occasion de vendre quelques poneys de polo de tout premier ordre. Puis, c’étaient les poneys d’une trentaine de teams éliminés, qui avaient été engagés par la Upper India Free For All Cup[1], presque tous poneys de valeur et de renom entre Mhow et Peshawer, entre Allahabad et Moultan ; poneys primés, arabes, syriens, de toutes les couleurs, toutes les formes, tous les caractères ima-

  1. Coupe de l’Inde Supérieure ouverte à tous.