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AVANT L’AMOUR.

teries où Maxime pouvait pressentir le vœu secret et combattu du mariage. Je fus coquette un peu innocemment et maladroitement et le viveur blasé se troubla au parfum de perversité ingénue qui lui venait de ma jeunesse. Il devina dans la vierge des promesses d’inconnue et fraîche volupté, une espèce de joie plus délicate que la vulgaire luxure des filles, plus rare que l’émotion vite épuisée des adultères mondains, plus complexe que la banalité des fiançailles bourgeoises. Incapable de comprendre ce sentiment qui m’eût fait horreur, je vis dans les assiduités de Montauzat un hommage amusant, un jeu nouveau où s’exerçaient mes énergies toutes neuves, la petite guerre de la coquetterie entre les batailles de la passion. Muet, Maxime subit l’épreuve. « Allons ! me disais-je, je me suis trompée. Il ne m’aime pas ! » Je lui reprochai sa froideur. Il resta huit jours sans m’écrire et tout à coup je reçus une lettre singulière où la jalousie, la rancune, la tendresse se contredisaient pour affirmer l’amour. « Qu’as-tu besoin de moi ? Que suis-je dans ta vie ? Un homme a passé, mûr, flétri, usé, riche… Un mari possible ! L’ami de la veille n’est plus rien. » Et il ajoutait : « Permets-moi, chère Marianne, un affectueux conseil : tu sembles confondre l’amorçage d’un mari et la conquête d’un amant. Prends garde de suggérer à Montauzat un autre désir que celui d’un établissement légitime. Tu devrais te mettre à plus haut prix. Dans les mariages de ce genre où l’amour n’a que faire, s’il est répugnant de se vendre, il est ridicule de s’offrir. »

Le soir même, je revis Maxime. Pendant que les Gannerault faisaient leur whist accoutumé avec les Laforest et Montauzat, le jeune homme s’approcha du piano où j’égrenais des notes capricieuses. Il était étrangement ému. Craignait-il de m’avoir irritée ? Espérait-il qu’un retour de fierté me rendrait plus ombrageuse devant les tentatives de cour que risquait Montauzat ? Avant même qu’il eût parlé, je murmurai à demi-voix avec un sourire…

— Maxime, rien n’est changé. Tu n’as donc pas confiance dans mon cœur ?

Il me regarda…

— Tu n’as pas pu croire, repris-je, en désignant du geste le gentilhomme chauve, pâle et gras, qui nous tournait le dos, tu n’as pas pu croire que ce débris de la haute noce… Ah ! Maxime, tu me connais mal !