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chronique politique

maire/les lois proposées par M. Ferry introduisent le principe de l’obligation et de la gratuité, mais la question de la laïcité est laissée de côté. Le gouvernement a, sans doute, de fort bonnes raisons pour se réserver sur ce point. Ce n’est pas tout que de décréter la laïcité de l’enseignement primaire ; encore faut-il avoir un personnel d’instituteurs laïques suffisant pour pouvoir se passer des congréganistes. Mais la majorité que passionnent si fort toutes les questions qui se rapportent au cléricalisme et qui tient au principe de la laïcité, se laissera-t-elle toucher par cette raison du manque de personnel et ne préférera-t-elle pas le projet de M. Bert à celui de M. Ferry ? Même incertitude au sujet de la loi sur la magistrature. Le projet de M. Cazot ne porte pas la suspension de l’inamovibilité. En réalité, les dispositions de ce projet permettent d’arriver à peu près au même résultat que si l’on procédait par une suspension de l’inamovibilité, mais là encore il est possible que la majorité et le gouvernement aient quelque peine à se mettre d’accord. En tous cas, la lutte sera vive. Voilà les petits points noirs que l’on aperçoit à l’horizon. Ce n’est que lorsque les questions que je viens d’indiquer auront été résolues que l’on saura exactement sur quelle majorité le ministère peut compter et jusqu’à quel point cette majorité accepte sa direction.

Je parlais plus haut du projet de réunion plénière des gauches. dont il avait été question à la Chambre. Un projet analogue a été mis à exécution au Sénat, non toutefois par les gauches, mais par les droites. Les légitimistes, les bonapartistes et les orléanistes, oubliant, — pour combien de jours, je l’ignore, — leurs vieilles querelles et leurs mutuels mépris, se sont réunis en assemblée plénière, et dans cette réunion ils ont décidé de constituer un comité directeur, composé de douze membres pris dans chacune des fractions de la droite sénatoriale : six dans la droite royaliste, quatre dans le centre droit, deux parmi les bonapartistes. Ce comité, dont les membres ont été immédiatement désignés, a pour mission de prendre toutes les décisions que commanderont les circonstances. Ces décisions s’imposeront à tous les sénateurs de droite, qui devront agir et voter comme un seul homme conformément aux indications du comité directeur. Il n’y a pas une grande importance à attacher à cette résurrection de l’union con-