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corporelle, qui n’ait été auparavant ſoigneuſement examinée ; mon opinion eſt qu’on devroit faire l’eſſai des viandes ſpirituelles qui leur ſont deſtinées, avec encore plus de précaution. En voici que j’expoſe pour cela au public, & que je ne penſe pas qu’on doive rejetter, puiſque les plus grands Monarques de l’antiquité ſe ſont bien trouvez d’en avoir usé. En effet, ſupposé que c’eſt le naturel des peuples de prendre de leur Souverain, comme d’un moule public, la forme de la plupart de leurs actions, qui ne voit la conſequence de ſon inſtitution, d’où doit venir en partie celle de ſes ſujets ? Et qui peut nier que ce ne ſoit le plus grand crime qu’on puiſſe commettre contre la ſocieté civile, de mal régler un principe qui doit être la meſure de tant de choſes qu’on ſait lui étre ſubordonnées ? On a toujours bien dit en général, que le ſoin de la jeuneſſe étoit de ſi grande conſequence, qu’on ne voyoit rien qui le fût davantage dans toutes ſortes d’Etats. Mais c’eſt principalement des Enfans nez pour avoir le maniement des Sceptres que cette maxime eſt très-véritable ; toutes les deſtinées des hommes qui leur doivent être ſoûmis étant comme attachées, ſoit pour le bien, ſoit pour le mal, à leur premiere nourriture. De-là vient, qu’ainſi que jet-