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théatre du monde à un homme de jugement ; car celui, qui étoit échû à la Mothe le Vayer étoit le plus ſouhaitable, que l’on puiſſe concevoir dans cette claſſe de perſonnes. Il n’y manquait aucun agrément ſi nous en jugeons par l’extérieur. C’eſt un avantage que tous les hommes de Lettres & bien d’autres auſſi ſe donneroient, ſi cela dépendoit d’eux. Il fut très bien élevé par un Pere docte, & que ſon mérite & ſes emplois rendirent conſidérable. Il fût utilement aimé, & conſidéré des deux Cardinaux qui gouvernerent la France ſucceſſivement. Les beaux titres & les emplois honorables ne lui manquerent point. Car il fut Conſeiller d’état ordinaire & Précepteur du Frere unique du Roi. (Il le fut auſſi du Roi)

Il ſe diſtingua glorieuſement parmi les auteurs & mérita une place dans l’Académie Françoiſe. Les ouvrages qu’il publia en très grand nombre, eurent beaucoup de débit. Ils furent mis ſous la preſſe diverſes fois ſéparément, & puis en corps. Il eut du bien autant, que ſa condition le demandoit. Il s’étoit un peu égaré dans les plaiſirs pendant les feux de ſa première jeuneſſe ; mais il s’en délivra bien tôt, & depuis il mena très conſtamment une vie pure, qui le fit regarder comme un Sectateur rigide de la plus belle Morale, de ſorte qu’il acquit par-là une eſtime ſingulière. C’eſt une plus grande perfection d’être toûjours ſage que de le devenir par la voie de l’amendement ; Mais il eſt plus difficile de ſe convertir à la ſageſſe, que de s’en écarter jamais. Il y avoit donc dans cette partie du rôle de la Mothe le Vayer une eſpèce d’agrément. Elle faiſoit ſouvenir de la force, que l’on avoit euë de renoncer à un bien