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Quelques étrangers réfugiés dans la capitale s’attroupèrent pour la défense de leur vie. Les bijoutiers, les changeurs, les marchands d’étoffes se rassemblèrent près d’eux ; l’intendant des meubles de la couronne se mit à leur tête, avec Djenan-Eddin, médecin de la cour ; ils se battirent quelque temps en désespérés ; mais, n’étant point accoutumés à manier les armes, ils n’eurent que la satisfaction de mourir le sabre à la main. Otter assure qu’il périt dans ce massacre plus de deux cent mille personnes. Un grand nombre de ceux qui échappèrent à ce carnage prirent heureusement la fuite.

Nizam-oul-Moulk et le grand-visir, pensant à sauver le reste de la ville, allèrent se jeter aux pieds de Nadir-Schah pour lui demander grâce. Il donnait ordre en ce moment de porter le fer et le feu dans les autres quartiers. Les omhras furent mal reçus. Cependant, après avoir exhalé son courroux dans un torrent d’injures et de menaces, il se laissa toucher, et l’ordre fut donné aux officiers de rappeler les troupes. Les habitans reçurent celui de se renfermer dans leurs maisons, et la tranquillité fut aussitôt rétablie.

Le lendemain on obligea les soldats de rendre la liberté à toutes les femmes qu’ils avaient enlevées, et les habitans d’enterrer tous les cadavres, sous peine de mort. Ces malheureux demandaient le temps de séparer les corps des musulmans de ceux des Indiens idolâtres,