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les banians. Il n’y en a point aussi de plus ingénieux, de plus habiles, et même de plus savans. On voit parmi eux des gens éclairés dans toutes sortes de professions, surtout des banquiers, des joailliers, des écrivains, des courtiers très-adroits, et de profonds arithméticiens. On y voit de gros marchands de grains, de toiles de coton, d’étoffes de soie, et de toutes les marchandises des Indes. Leurs boutiques sont belles, et les magasins richement fournis ; mais il n’y faut chercher ni viande ni poisson. Les banians savent mieux l’arithmétique que les chrétiens et les Maures. Quelques-uns font un gros commerce sur mer, et possèdent d’immenses richesses ; aussi ne vivent-ils pas avec moins de magnificence que les Maures. Ils ont de belles maisons, des appartemens commodes et bien meublés, et des bassins d’eau fort propres pour leurs bains. Ils entretiennent un grand nombre de domestiques, de chevaux et de palanquins ; mais leurs richesses n’empêchent point qu’ils ne soient soumis aux Maures dans tout ce qui regarde l’ordre de la société, à l’exception du culte religieux, sur lequel aucun empereur mogol n’a jamais osé les chagriner. Il est vrai qu’ils achètent cette liberté par de gros tributs qu’ils envoient à la cour par leurs prêtres, qui sont les bramines. Elle en est quitte pour quelques vestes ou quelque vieil éléphant, dont elle fait présent à leurs députés. Ils paient aussi de grosses sommes aux gouverneurs, dans la crainte qu’on