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vient vous faire un compliment de leur part. On leur envoie ce qu’on veut, ou bien on le porte soi-même, quand on a la curiosité de voir leur visage ; ce qui arrive rarement, parce qu’elles se couvrent la tête d’un voile ; mais elles présentent ordinairement un billet de quelque religieux qui les recommande, et qui rend témoignage de leurs richesses passées, en exposant leur misère présente. Ainsi le plus souvent on entre en discours avec la belle ; et, par honneur, on la prie d’entrer pour faire une collation, qui dure quelquefois jusqu’au lendemain. Il est constant, ajoute encore Tavernier, que, si les Hollandais n’étaient pas venus aux Indes, on ne trouverait pas aujourd’hui, chez la plupart des Portugais de Goa un morceau de fer, parce que tout y serait d’or ou d’argent. »

Le vice-roi, l’archevêque et le grand-inquisiteur, auxquels Tavernier rendit ses premiers devoirs, le reçurent avec d’autant plus de civilité, que ses visites étaient toujours accompagnées de quelque présent. C’était don Philippe de Mascarenhas qui gouvernait alors les Indes portugaises. Il n’admettait personne à sa table, pas même ses enfans ; mais dans la salle où il mangeait on avait ménagé un petit retranchement où l’on mettait le couvert pour les principaux officiers et pour ceux qu’il invitait ; ancien usage d’un temps dont il ne restait que la fierté. Le grand-inquisiteur, chez lequel Tavernier s’était présenté, s’excusa d’a-