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deux ermites, dont il se saisit, et que ses menaces forcèrent de parler, lui apprirent que le vieillard auquel nous avions fait grâce de la vie avait trouvé la force de se rendre aux grands édifices ; que, sur le récit de son aventure, l’alarme s’était répandue parmi tous les bonzes ; que, dans la crainte du même sort pour leurs maisons et pour leurs temples, ils avaient pris le seul parti qui convenait à leur profession, c’est-à-dire celui d’avertir les cantons voisins par des feux et par le bruit des cloches, et qu’ils espéraient un prompt secours du zèle de la piété des habitans. Les gens de Faria profitèrent du temps pour enlever sur l’autel une idole d’argent qui avait une couronne d’or sur la tête et une roue dans la main ; ils prirent aussi trois chandeliers d’argent avec leurs chaînes, qui étaient fort grosses et fort longues. Faria, se repentant trop tard du ménagement qu’il avait eu pour le premier ermite, emmena ceux qui lui parlaient, et les fit embarquer avec lui. Il mit aussitôt à la voile, en s’arrachant la barbe, et se reprochant d’avoir perdu par son imprudence une occasion qu’il désespérait de retrouver.

» Son retour jusqu’à la mer fut aussi prompt que le cours d’une rivière fort rapide, aidé du travail des rames et de la faveur du vent. Après sept jours de navigation, il s’arrêta dans un village nommé Susequerim, où, ne craignant plus que le bruit de son entreprise eût pu le suivre, il se pourvut de vivres, qui re-