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vaisseau. Comme elles ne ressemblaient point à celles du pays, la curiosité lui faisait souhaiter des explications. Il n’en avait pas moins pour se faire instruire des mœurs et des usages de l’Europe. Cette conversation hâta les progrès de Pyrard dans la langue, et lui en fit faire encore de plus utiles dans l’estime d’Aly Pandio. Il obtint des vivres et d’autres secours qui lui rendirent sa situation plus supportable.

Aly Pandio était parent d’Ibrahim, seigneur de Pouladou, et l’amitié, jointe aux liens du sang, le portait à lui rendre de fréquentes visites. Les compagnons de Pyrard, qui étaient restés dans l’île de Pouladou, mouraient les uns après les autres. Le capitaine, le premier commis, le contre-maître, et quantité de matelots étaient déjà morts. Le maître, qui, après avoir été conduit dans l’île de Malé, était revenu à Pouladou, voyant que depuis la mort du capitaine le roi ne parlait plus de la barque qu’il lui avait promis d’équiper pour l’île de Sumatra, forma l’entreprise de se sauver. Il ne communiqua son dessein qu’à douze de ses compagnons, qui se conduisirent avec tant d’adresse, qu’enfin ils surprirent la barque d’Aly Pandio dans une visite que ce seigneur rendit à Ibrahim. Ils se fournirent d’eau douce et de cocos, qu’ils avaient secrètement cachés dans un bois voisin, et s’embarquèrent en plein midi, c’est-à-dire dans le temps qu’on s’en défiait le moins. Cependant les insulaires s’en aperçurent bientôt ; mais, n’ayant pas d’autres barques pour