Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 4.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui savait quelques mots portugais, leur fit diverses questions dans cette langue ; après quoi ils furent fouillés par ses gens, qui leur ôtèrent tout ce qu’ils portaient, comme appartenant au roi des Maldives, depuis que leur navire était perdu sur ses côtes. Le capitaine avait sauvé une pièce d’écarlate. On lui demanda ce que c’était ; il répondit que c’était un présent qu’il voulait faire au roi, et qu’il n’avait tiré cette pièce du vaisseau que pour l’offrir plus entière, dans la crainte qu’elle ne fût altérée par les flots. Cette déclaration inspira tant de respect aux insulaires, qu’ils n’osèrent y porter la main, ni même y jeter leurs regards. Le capitaine et ses compagnons résolurent néanmoins d’en couper deux ou trois aunes, et d’en faire présent au seigneur de l’île, pour lui inspirer quelques sentimens de bonté en leur faveur. Mais, apprenant bientôt qu’on voyait venir les officiers du roi, il rendit l’écarlate au capitaine, et le conjura de ne pas dire même qu’il y eût touché.

Quelques officiers, qui arrivèrent effectivement, prirent le maître du Corbin avec deux matelots, et les menèrent à quarante lieues de Pouladou, dans l’île de Malé, qui est la capitale de toutes les Maldives et le séjour ordinaire du roi. Le maître, ayant porté avec lui la pièce d’écarlate, et l’ayant présentée à ce prince, en reçut un traitement fort civil et fut logé dans le palais. Un prince, nommé Ra-