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dans l’île entière. Leurs chefs président aux assemblées. On les respecte, on les écoute ; mais la déférence pour leur jugement n’est jamais forcée. Chacun prend le parti qui lui convient, sans y trouver d’opposition, parce que ces peuples n’ont proprement aucun maître, ni d’autres lois que certains usages, dont ils n’observent religieusement un petit nombre que par la force de l’habitude.

Dans une si profonde barbarie, on remarque entre les chamorris quelque apparence de politesse. Lorsqu’ils se rencontrent ou qu’ils passent les uns devant les autres, ils se saluent par quelques termes civils. Ils s’invitent mutuellement à manger. Ils se présentent une herbe qu’ils ont toujours à la bouche, et qui leur tient lieu de tabac. Une de leurs civilités les plus ordinaires, est de passer la main sur l’estomac de ceux qu’ils veulent honorer. C’est une extrême incivilité parmi eux de cracher devant ceux à qui on doit du respect. Leur délicatesse va là-dessus jusqu’à la superstition. Ils crachent rarement, et jamais sans beaucoup de précautions. Ils ne crachent jamais près de la maison d’un autre, ni le matin. Les plus graves en apportent quelques raisons qu’on n’a pas bien pénétrées, et qui n’en valent pas trop la peine.

Leur occupation la plus commune est la pêche : ils s’y exercent dès l’enfance ; aussi nagent-ils comme des poissons. Leurs canots sont d’une légèreté surprenante et d’une pro-