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DES VOYAGES


faction de voir que les insulaires me comprenaient, car ils me répondirent par un cri de joie universel. Les femmes revinrent sur-le-champ de la pente de la montagne où elles s’étaient réfugiées ; les hommes déposèrent leurs nattes de combat ; ils s’assirent tous au bord de la mer, ils me tendirent les bras, et ils m’invitèrent à descendre.

» Quoique cette conduite indiquât des dispositions très-amicales, il me resta malgré moi des doutes sur la sincérité des insulaires. Mais quand je vis Koah s’élancer au milieu des flots, un pavillon blanc à la main, et nager vers mon canot avec une hardiesse et une tranquillité qu’il est difficile de concevoir, je crus devoir répondre à cette marque de confiance, et je le reçus sur mon bord, quoiqu’il fût armé, circonstance qui n’était pas propre à diminuer nos soupçons ; et j’avoue que depuis longtemps j’avais mauvaise opinion de lui. Les prêtres nous avaient toujours avertis qu’il était méchant, qu’il ne nous aimait pas ; et des actes multipliés de dissimulation et de perfidie de sa part nous avaient convaincus de la justesse de cet avis. L’odieuse attaque du matin, dans laquelle il avait joué le principal rôle, m’inspira de l’horreur, et je fus affligé de me trouver près de lui : il m’embrassa ; mais je me défiais tellement de ses intentions, que je ne pus m’empêcber de saisir la pointe de son paouah et de l’écarter. Je lui dis que nous redemandions le corps du capitaine Cook, et que nous décla-