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projet de nous arrêter : ils n’annonçaient pas, il est vrai, assez de férocité pour me donner de l’inquiétude sur nos jours ; mais il était douloureux de voir que leur curiosité pourrait bien nous détenir prisonniers. Je demandai quelque chose à manger, et ils m’apportèrent tout de suite des cocos, du fruit à pain, et une espèce de poudding acide, qu’une femme me présenta. Ayant témoigné que la chaleur occasionée par la foule me causait beaucoup de malaise, le chef lui-même voulut bien me donner de l’air avec un éventail, et il me fit présent d’une pièce d’étoffe qui lui couvrait les reins.

» M. Burney vint à l’endroit où je me trouvais, et je lui fis part de mes soupçons. Pour reconnaître s’ils étaient bien fondés, nous entreprîmes de gagner la grève ; mais nous fûmes arrêtés à mi-chemin par des hommes qui nous dirent qu’il fallait retourner au lieu d’où nous étions partis. En arrivant, nous rencontrâmes O-maï qui avait les mêmes inquiétudes ; il croyait même avoir une raison de plus de s’effrayer : il avait vu les insulaires creuser en terre un four qu’ils chauffaient alors ; et il ne pouvait assigner d’autre but à ces préparatifs que celui de nous rôtir et de nous manger, selon l’usage des habitans de la Nouvelle-Zélande. Il alla même jusqu’à leur demander si c’était là leur projet. Les naturels, très-surpris de cette question, demandèrent à leur tour si nous suivions une pareille coutume. Nous fûmes un peu fâchés, M. Burney et moi, du propos indiscret