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» Puisque mon sujet me conduit à parler encore des anthropophages, je demande à ceux qui soutiennent que le manque de subsistances a déterminé les premiers cannibales à manger de la chair humaine, ce qui décide les habitans de Fidji à conserver cet usage au milieu de l’abondance. Il paraît que tous les peuples du grand Océan ont été autrefois cannibales ; que plusieurs le sont encore, et qu’on trouve sur chacune de ces terres des traditions qui attestent ce fait, et des restes de l’horrible usage de manger de la chair humaine.

» On pense sans doute qu’ayant passé près de trois mois parmi les habitans des îles des Amis, je suis en état de répondre à toutes les difficultés, et de donner une description satisfaisante de leurs usages, de leurs opinions et de leurs institutions civiles et religieuses : cette opinion paraît d’autant mieux fondée, que nous avions à bord un naturel du grand Océan qui entendait la langue du pays et la nôtre, et qui semblait très-propre à nous servir d’interprète ; mais le pauvre O-maï ne nous fut pas aussi utile, sous ce rapport, qu’on pourrait le croire. À moins que l’objet ou la chose que nous voulions connaître ne se trouvât sous nos yeux, nous avions bien de la peine à acquérir même des notions imparfaites. Nous faisions cent méprises, et O-maï était encore plus sujet à ces méprises que nous ; car n’ayant point de curiosité, il ne s’avisa jamais de recueillir des observations pour lui-même, et quand il était