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thode qu’avait suivis la première bande lorsqu’elle déposa les petits bâtons à terre.

» Quand la dernière bande fut arrivée, quelques personnes prononcèrent des harangues ou des prières, et nous nous levâmes tous brusquement au signal qu’on nous donna ; nous courûmes durant un moment à gauche, et nous nous assîmes le dos tourné au prince et aux insulaires qui occupaient le hangar. On me dit de ne pas regarder derrière moi : toutefois, malgré la défense des naturels et le souvenir de l’accident arrivé à la femme de Loth, je détournai le visage pour voir ce qui se passait. Le prince regardait le moraï ; mais la dernière évolution avait placé tant de monde entre lui et moi, que je ne pus apercevoir ce qu’on faisait au hangar. On m’assura ensuite que ce fut le moment où l’on revêtit le prince de l’honneur suprême de manger avec son père, et qu’on servit au roi et à son fils un morceau d’igname grillé. Je suis d’autant plus disposé à le croire, qu’on nous avait annoncé d’avance que cela devait avoir lieu durant la cérémonie, et que d’ailleurs les insulaires regardaient d’un autre côté ; usage qu’ils observent toujours lorsque leur monarque mange.

» Peu de temps après, nous nous retournâmes tous en face du hangar, et nous nous formâmes en cercle devant le prince, laissant entre nous et lui un grand espace libre. Quelques hommes s’approchèrent alors de nous deux à deux ; ils portaient sur leurs épaules de gros