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les dix hommes du capitaine Furneaux, montait une des pirogues. C’était la troisième fois qu’il venait nous voir, sans montrer la plus légère frayeur. J’étais à terre lorsqu’il se rendit à bord, et j’y revins au moment où il partait. O-maï, qui m’avait accompagné à terre, l’aperçut ; il le dénonça tout de suite, et il me conjura de le faire tuer à coups de fusil. Ce n’est pas tout, il adressa la parole à Kahoura, et il le menaça de le poignarder de sa propre main, s’il avait la hardiesse de revenir.

» Le Zélandais fut si peu effrayé de ces menaces, qu’il revint le lendemain avec toute sa famille, composée de vingt personnes, y compris les femmes et les enfans. O-maï m’en avertit de nouveau, et il me demanda s’il devait l’engager à monter à bord. Je lui répondis qu’il le pouvait. Bientôt après, il amena ce chef dans ma chambre, et il me dit : « Voilà Kahoura, tuez-le.» Mais, oubliant ses menaces de la veille, ou craignant que je ne le chargeasse de l’exécution, il se retira tout de suite. Cependant il reparut bientôt ; et voyant Kahoura sur ses pieds, il s’écria d’un ton de reproche : « Pourquoi ne le tuez-vous pas ? Vous m’assurez qu’on pend en Angleterre l’homme qui en tue un autre ; ce barbare en a tué dix, et vous ne voulez pas lui donner la mort, quoique la plupart de ses compatriotes le désirent, quoique cela soit juste ! » L’éloquence assez solide d’O-maï me fit rire : je lui enjoignis de demander au Zélandais pourquoi il avait tué