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futailles qu’on remplissait avec aisance. Plus loin on tirait des plantes indigènes, dont les naturels du pays ignoraient la propriété, une boisson agréable et salutaire qui rafraîchissait les travailleurs. D’autres apprêtaient un repas de poissons délicieux ; les calfats et les matelots placés sur les côtés du vaisseau et sur les mâts contribuaient à animer la scène, et remplissaient l’air de leurs chants, tandis que l’enclume, au bas de la colline voisine, résonnait sous les coups du marteau : déjà les arts commençaient à fleurir dans ce nouvel établissement ; le crayon ou le pinceau d’un jeune artiste rendaient la forme des animaux et des végétaux de ces bois déserts ; cette contrée pittoresque et sauvage se retrouvait sur une toile : la nature, étonnée de se voir si fidèlement copiée, y conservait ses teintes et ses couleurs les plus brillantes. Les sciences ne dédaignaient point ce lieu solitaire ; un observatoire garni des meilleurs instrumens occupait le centre des ouvrages, et l’œil attentif d’un astronome y contemplait le mouvement des corps célestes : des philosophes observaient les plantes et les animaux des forêts et des mers : en un mot, on apercevait de tous côtés la naissance des arts et des sciences au milieu d’un pays plongé jusque-là dans une longue nuit d’ignorance et de barbarie ; mais ce charmant tableau ne devait pas subsister long-temps ; il s’évanouit comme un météore. Nos outils et nos instrumens furent reportés à bord : un reste de culture attesta seul notre séjour. Les ronces