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virait de bord. Cette opération troubla dans sa retraite un scorpion caché au fond d’une crevasse : il était probablement entré à bord avec les fruits que nous avions pris sur les îles. Notre ami Oedidi nous assura qu’il ne faisait point de mal, mais sa figure seule nous inspirait la crainte. L’eau remplissait les lits de toutes les cabanes, et d’ailleurs le mugissement épouvantable des vagues, le craquement des membrures et le roulis nous privaient du repos. Ce qui mettait le comble à cette scène d’horreur, c’est que nous entendions de temps en temps les voix des matelots, plus fortes que les vents ou que la mer en fureur, vomissant des imprécations affreuses. Il est impossible d’imaginer quels juremens variés, bizarres et horribles, leur emportement leur suggérait, sans motif, contre toutes les parties du bâtiment. Endurcis aux dangers dès le bas-âge, l’image de la mort n’arrêtait point leurs blasphèmes. »

Le 2 novembre on gagna enfin le rivage d’Iheïnomaoui. Cook ayant découvert, au côté est du cap Tiéréouiti, une nouvelle baie qu’il n’avait point remarquée en 1770, y jeta l’ancre.

« Cette baie est entourée de montagnes noirâtres et pelées, d’une grande élévation, presque entièrement dénuées de bois et d’arbrisseaux ; elles forment de hautes masses de rochers aigus en se prolongeant dans la mer. La baie semblait s’étendre fort avant entre les montagnes, et sa direction laissait en doute si la terre sur laquelle gît le cap Tiéréouiti,