Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 24.djvu/336

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’eûmes un moment que trois brasses d’eau. Le vent commença à souffler : heureusement nous avions un endroit pour nous réfugier ; car nous reconnûmes bientôt que le vaisseau ne voulait plus manœuvrer. Notre situation n’était pas sans danger. Je mouillai donc par quatre brasses, à environ un mille de la côte, et je fis signal aux canots de revenir. J’allai ensuite moi-même dans le canal, que je trouvai très-étroit ; et je le balisai : le havre était aussi plus petit que je ne comptais ; mais il convenait parfaitement à l’usage que j’en voulais faire ; il était très-remarquable que dans tout notre voyage nous n’avions trouvé aucun mouillage qui pût nous procurer les mêmes avantages dans les circonstances où nous étions. Le reste du jour et toute la nuit le vent fut trop frais pour nous hasarder à lever l’ancre et à entrer dans le havre. Afin de nous mettre encore plus en sûreté, nous amenâmes sur le pont les mâts de hune et de perroquet, ainsi que les voiles et une partie des vergues, dans la vue d’alléger l’avant du vaisseau autant qu’il serait possible, afin de pouvoir parvenir à sa voie d’eau, que nous supposions être dans cette partie. Au milieu de la joie d’une délivrance inespérée, nous n’avions pas oublié que notre conservation ne tenait qu’à un bouchon de laine. Le vent continuant, nous gardâmes notre poste dans toute la journée du 15 ; le 16, il se modéra, et, sur les six heures du matin, je voulus mettre à la voile ; mais il fallut abandonner l’entreprise et