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aussi Topia à Eparré ; nous le ramenâmes avec nous au vaisseau, et il passa la nuit à bord pour la première fois.

» Le lendemain, 13 juillet, le vaisseau fut rempli des Taïtiens nos amis, dès la pointe du jour, et il fut environné d’un grand nombre de pirogues qui portaient d’autres insulaires d’une classe inférieure. Nous levâmes l’ancre entre onze heures et midi ; et dès que le vaisseau fut sous voiles, les Taïtiens prirent congé de nous, et versèrent des larmes, pénétrés d’une tristesse modeste et silencieuse, qui avait quelque chose de tendre et de très-intéressant. Les insulaires qui étaient dans les pirogues semblaient au contraire se disputer à qui pousserait les plus grands cris ; mais il y entrait plus d’affectation que de véritable douleur. Topia soutînt cette scène avec une fermeté et une tranquillité vraiment admirables : il est vrai qu’il pleura ; mais les efforts qu’il fit pour cacher ses larmes, faisaient encore plus d’honneur à son caractère. Il envoya par Othéothéa une chemise pour dernier présent à Potomaï, maîtresse favorite de Toutahah ; il alla ensuite sur la grande hune avec M. Banks, et il fit des signes aux pirogues tant qu’il continua à les voir.

» C’est ainsi que nous quittâmes l’île de Taïti et ses habitans après un séjour de trois mois. Nous vécûmes pendant la plus grande partie de ce temps dans l’amitié la plus cordiale, et nous nous rendîmes réciproquement