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Cependant il s’aperçut qu’il manquait une bouteille de rhum, qui faisait toute la provision de la troupe ; il conjectura qu’elle était dans le havre-sac d’un des absens, et en conclut que le noir et le matelot, qu’on avait laissés avec Richmond, s’étaient servis de ce moyen pour se tenir en haleine, et que tous trois en ayant bu un peu trop, s’étaient écartés de l’endroit où on les avait laissés, au lieu d’attendre les secours et les guides qu’on leur avait promis. Sur ces entrefaites, la neige ayant recommencé à tomber et duré deux heures sans relâche, on désespéra de revoir ces malheureux, au moins vivans. Mais, vers minuit, à la grande satisfaction de ceux qui étaient autour du feu, on entendit des cris à quelque distance. Banks et quatre autres se détachèrent sur-le-champ, et trouvèrent le matelot n’ayant que la force qu’il lui fallait pour se soutenir en chancelant, et pour demander qu’on l’aidât. Banks l’envoya tout de suite auprès du feu, et, à l’aide des renseignemens qu’on put tirer de lui, on se remit à la recherche des deux autres, qu’on retrouva bientôt après. Richmond était debout, mais ne pouvant mettre un pied devant l’autre. Son compagnon était étendu sur la terre, aussi insensible qu’une pierre ; on fit venir tous ceux qui étaient auprès du feu, et on essaya d’y porter ces deux hommes ; tous les efforts furent inutiles ; la nuit était extrêmement noire ; la neige était très-haute, et il leur était très-difficile de se faire un chemin à travers les