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en foule autour de nous dès que nous fûmes de retour, et aucun ne s’approcha les mains vides. Quoique j’eusse résolu de rendre les pirogues détenues à ceux qui en étaient les propriétaires, on ne l’avait point encore fait ; les Taïtiens les redemandèrent de nouveau, et enfin je les relâchai. Je ne puis m’empêcher de remarquer à cette occasion que ces peuples pratiquent de petites fraudes les uns envers les autres avec une mauvaise foi réfléchie, qui me donna beaucoup plus mauvaise opinion de leur caractère que les vols qu’ils commettaient en succombant aux tentations violentes qui les sollicitaient à s’approprier nos métaux et les productions de nos arts, qui ont pour eux un prix inestimable.

» Parmi ceux qui s’adressèrent à moi pour me prier de relâcher leur pirogue, il y avait un certain Pottatou, homme de quelque importance, que nous connaissions tous : j’y consentis, supposant qu’une d’elles lui appartenait, ou qu’il la réclamait en faveur d’un de ses amis : il alla en conséquence sur le rivage s’emparer d’une des pirogues, qu’il commençait d’emmener à l’aide de ses gens. Cependant les véritables propriétaires du bateau vinrent bientôt le redemander ; et, soutenus par les autres Taïtiens, ils lui reprochèrent à grands cris qu’il volait leur bien, et ils se mirent en devoir de reprendre la pirogue par force. Pottatou demanda à être entendu, et dit pour sa justification que la pirogue avait