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naires le soin de sa femme et de ses enfans pendant son absence. On se hâte de renvoyer au vaisseau pour arrêter le départ de cet homme, mais il était trop tard. Ce malheureux sauvage fut emmené en Hollande. Comme on l’y faisait voir pour de l’argent, on s’aperçut à certains signes qu’il était chrétien, et l’on conjectura qu’il avait été attiré au baptême par adresse ou par force. On lui répéta d’abord le nom de famille des frères Moraves qui étaient au Groënland ; mais ne les connaissant que sous leur nom de baptême, il ne comprit rien à ce qu’on lui disait. On lui chanta ensuite quelques versets d’un hymne. Aussitôt il se mit à chanter. Pour savoir s’il était de la mission des Danois ou de celle des herrnhuters allemands, on entonna quelques paroles sur un ton qui n’était pas celui du rituel ordinaire. Il continua sur ce même ton. Ensuite le même monde s’attroupant autour de lui, ce Groënlandais répéta souvent le nom de Jésus. Puis regardant les meubles de sa chambre avec un air de mépris, il frappa sur sa poitrine, et se mit à genoux. On comprit alors qu’il voulait parler du mépris du monde et prêcher l’amour de Jésus, s’imaginant avoir devant les yeux une troupe de païens à convertir. Cette singularité fit du bruit à Amsterdam, où ce sauvage avait excité la curiosité du public. Les matelots, qui craignaient les enquêtes du magistrat sur l’enlèvement de ce malheureux, le ramenèrent à bord de leur vaisseau. Matthieu Stach, qui