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chez les Écossais qui firent la guerre à Charles 1er., et le livrèrent ou le vendirent à Cromwell. L’orateur, qui ne parle jamais sans se croire inspiré, dit avec confiance tout ce qui se présente plutôt à sa bouche qu’à son esprit ; et quand, la parole vient à lui manquer, il a recours aux larmes qui ont tant d’influence sur les âmes moins sensibles. Ces pleurs ont bien plus d’éloquence que les discours ; et c’est là que le missionnaire des sauvages est au-dessus de l’orateur des rois. C’est cet empire de la parole et des larmes sur les sens et le cœur des hommes assemblés qui sans doute a si rapidement étendu les progrès de l’Évangile chez les nations errantes de l’Amérique, qui a civilisé les habitans du Paraguay, qui les a mis sous le joug d’une société trop répandue et trop puissante pour n’avoir pas mêlé quelques artifices à de grandes vertus.

Les frères Moraves semblent avoir étudié l’histoire et la marche des jésuites dans leur établissement. Nés dans une plus grande obscurité, ils se sont multipliés en aussi peu de temps. C’est le même enthousiasme, la même ferveur, le même esprit d’union et de fraternité. Si ces missionnaires luthériens, plus ignorans, n’ont pas eu l’oreille des rois, et ne se sont pas attachés spécialement à une cour pour s’insinuer dans toutes les autres avec une adresse plus souterraine encore, ils commencent, en gagnant le bas peuple, à se glisser dans toutes sortes d’états et de conditions, à se faire en