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tant de leur avoir inspiré de l’effroi, ils se rembarquèrent tous dans leurs canots pour fondre avec de grands cris sur les chaloupes. De Cordes les laissa venir jusqu’à la portée du fusil, et fit faire sur eux une décharge qui en tua quatre ou cinq. Ils retournèrent à terre, où, dans leur fureur, ils arrachèrent de leurs propres mains des arbres qui paraissaient gros de neuf ou dix pouces, pour s’en faire des retranchemens et des armes. Tous ces sauvages étaient entièrement nus, à l’exception d’un seul qui avait autour du cou une peau de phoque, qui lui couvrait le dos et les épaules. Leurs armes étaient des flèches d’un bois fort dur, qu’ils lançaient vigoureusement avec la main, et dont la pointe avait la forme d’un harpon. Elle demeurait dans le corps de ceux qui en étaient blessés, n’étant attachée au bout du bois qu’avec des boyaux de phoque ; et ce n’était pas sans beaucoup de peine qu’on l’en tirait, parce qu’elle pénétrait fort avant. La prudence obligea l’amiral d’abandonner ces furieux ; mais d’autres Hollandais, qui furent surpris peu de jours après, ne se dégagèrent pas avec le même bonheur. Ils perdirent plusieurs de leurs gens ; et l’amiral ayant envoyé au même lieu des forces plus nombreuses, on n’y trouva plus de ces hommes cruels, ou plutôt de ces bêtes brutes, mais on y vit d’horribles marques de leur brutalité. Ils avaient inhumainement défiguré les cadavres des morts.

La tempête dispersa la flotte lorsqu’elle en-