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visions, ils moururent presque tous de faim dans leurs maisons, où les Anglais trouvèrent leurs cadavres tout vêtus. L’air en était encore infecté. Vingt-quatre de ces malheureux et deux femmes, qui étaient demeurés vivans, avaient pris le parti d’ensevelir dans la terre leurs meubles et tout ce qu’ils n’avaient pas eu la force d’emporter, pour abandonner cette funeste demeure, et se mettre en chemin le long du rivage, dans l’espoir d’y trouver de quoi soutenir leur misérable vie. Ils n’avaient pris que leurs arquebuses et quelques ustensiles ; mais, à l’exception de quelques oiseaux de mer qu’ils avaient tués par intervalles, ils n’avaient vécu, pendant l’espace d’un an, que de racines et de feuilles. Enfin ils résolurent de prendre leur route vers le Rio de la Plata, ainsi qu’Hernando le dit aux Anglais ; mais l’on ne sait ce qu’ils devinrent.

Cavendish changea le nom de leur malheureuse colonie en celui de Port de Famine, qu’il a conservé depuis. Le 14 il parvint à la pointe la plus méridionale de l’Amérique, et la nomma cap Froward. Il donna aussi le nom de baie d’Élisabeth à une baie sablonneuse qui est à vingt lieues au nord-ouest de ce cap. Deux lieues plus loin, il trouva une rivière d’eau douce, et quantité de sauvages très farouches qui mangeaient de la viande toute crue, et qui lui parurent anthropophages. Il pensa que c’étaient eux qui avaient détruit la colonie de Philippeville ; car on trouva chez