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portion aux frères. Les missionnaires danois leur firent gagner aussi quelques vivres à écrire ou copier pour eux ; mais, se trouvant eux-mêmes bientôt à l’étroit, ils furent obligés d’envoyer à la baie de Disko, dès le mois de mai, pour renouveler leurs provisions. Ypegau, le bon ami des frères, se trouvait souvent dépourvu ; les autres Groënlandais gardaient tout ce qu’ils avaient pour leurs festins d’assemblée, et dans un seul repas, qui dura toute la nuit, les herrnhuters eurent la douleur de leur voir dévorer onze phoques, sans en vouloir céder la moindre partie pour de l’argent.

Cependant ces étrangers se soutinrent en assez bonne santé durant l’hiver : mais au printemps, réduits à l’algue marine, leurs forces diminuèrent au point que, n’étant plus en état de conduire leur bateau, ils devenaient le jouet des vents et des vagues. L’un d’entre eux se serait infailliblement noyé, si deux Groënlandais, qui se trouvaient à sa portée, ne l’eussent sauvé et conduit à terre en remorquant son bateau entre leurs kaiaks. Ces accidens étaient heureusement entremêlés de quelque faveur de la Providence. Une fois on trouva une baleine morte, dont on leur donna de quoi faire deux repas. Une autre fois qu’ils avaient passé cinq jours à ne manger que des coquillages, un Groënlandais leur apporta un marsouin tiré du ventre de la mère, mais qui ne put leur suffire que pour un repas. Dans une autre occasion, forcés par le vent contraire à relâcher dans une