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des buissons. Ils étalent tous peints de différentes manières. Le capitaine voulut retenir les deux plus jeunes et les mieux faits pour les mener avec nous en Espagne ; et, voyant qu’il était difficile de les arrêter par la force, il eut recours à l’artifice ; il leur donna une grande quantité de couteaux, miroirs, grains de verroterie, de sorte qu’ils en avaient les mains pleines : ensuite il leur offrit deux paires d’anneaux qui servent à enchaîner, et quand il vit qu’ils témoignaient le désir de les avoir, car ils aiment passionnément le fer, et que d’ailleurs ils ne pouvaient plus les prendre avec les mains, il leur proposa de les leur attacher aux jambes, pour les porter plus facilement chez eux : ils y consentirent. Alors nos gens leur appliquèrent les cercles de fer et en fermèrent les anneaux, de sorte qu’ils se trouvèrent enchaînés. Aussitôt qu’ils s’aperçurent de cette supercherie, ils devinrent furieux, soufflant, hurlant, et invoquant Setebos, qui est leur démon principal, pour qu’il vînt à leur secours. »

Le capitaine, qui voulait aussi avoir de leurs femmes pour porter en Europe cette race de géans, ordonna d’arrêter les deux autres pour les obliger de nous conduire à l’endroit où demeuraient leurs femmes. Neuf hommes des plus forts suffirent à peine pour les jeter à terre et les lier, et même l’un d’eux parvint encore à se délivrer tandis que l’autre fit de si grands efforts, qu’on le blessa légèrement à la tête ;