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des habitans qui furent moissonnés par la petite vérole. Égède le fait monter à trois mille âmes, car il en réchappa très-peu, et l’on n’en sauva que huit ou neuf dans le seul canton de Bals-Fiord, qui était le plus peuplé.

Les Européens eux-mêmes se ressentirent, sinon des atteintes, du moins des suites de ce fléau, soit par les peines qu’ils avaient prises autour des malades, soit par la malignité que l’air avait contractée de l’infection des cadavres, soit enfin par le genre de vie qu’ils étaient obligés de mener, passant continuellement d’une étuve chaude à l’air excessivement froid. De quelque part que vînt le mal, Égède en perdit sa femme, qui mourut après avoir contribué de toutes ses ressources au soulagement des malades, ne manquant jamais de leur envoyer les cordiaux et les remèdes qu’elle avait chez elle. Les missionnaires furent attaqués à leur tour du scorbut, maladie du pays, occasionée, à ce qu’on croit, par les brusques vicissitudes du froid et du chaud, et par le changement trop subit d’une vie oisive et sédentaire en une suite de courses et de travaux pénibles et forcés.

Cependant ils se rétablirent avec le cochléaria du printemps, et recommencèrent leurs visites dans les habitations que les ravages de la petite vérole avaient changées en tombeaux. Ils avaient la consolation de soulager les malades, mais sans espérance de convertir les âmes. Christian David, cet homme, qui de char-