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le sens avec le son, s’imaginaient qu’on voulait leur parler d’une rivière ; car Gud, qui chez les Danois signifie Dieu , ne veut dire que fleuve chez les Groënlandais. « Eh ! qui doute, disaient ceux-ci, que la rivière existe ? Comment ne croirai-je pas à Gud ? répondait un de ces sauvages : n’entends-je pas sa voix ? » C’était du bruit d’une rivière qu’il voulait parler. Les choses sublimes et inouïes qu’on leur racontait de la Divinité ne rapprochaient pas leurs esprits grossiers de la vérité. Les plus intelligens convenaient que Dieu avait pu créer l’homme ; mais que le Créateur se fût fait homme, et que l’auteur de la vie et de l’existence eût pu mourir, c’est ce qu’ils ne pouvaient croire. Il fallait donc suppléer aux raisonnemens théologiques, qui n’ont d’empire que sur l’esprit, par des moyens qui pussent agir sur les sens. Le chant était la ressource des missionnaires.

« Le chant des hymnes, disent-ils, quand il est doux, mélodieux, accompagné de l’onction du cœur, n’est pas la moindre partie d’un culte raisonnable. Cette espèce de théologie a toujours un heureux effet. Les hymnes s’apprennent aisément ; les enfans les chantent avec un son de voix qui pénètre. Les vérités les plus profondes s’insinuent par le charme de l’harmonie, et gravent dans les âmes une impression ineffaçable. » Dans les écoles de chant, ceux qui ne savent pas lire, assis sur un banc, apprennent à chanter l’un de l’autre. Les sœurs qui lisent presque toutes, savent encore mieux