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mal par le temps. Les gens du vaisseau me comblèrent de prévenances ; mais, outre que nous fûmes trois semaines auprès des bas-fonds de Bus sans pourvoir faire plus de six lieues, j’eus cinq tempêtes à essuyer, dont la dernière, qui m’accueillit à la pointe du Groënland, fut la plus dangereuse. Cependant les vents de nord et d’ouest, qui nous retardèrent, avaient éclairci les glaces flottantes ; de façon qu’à quelques montagnes près, que nous vîmes même d’assez loin, la mer fut libre, et sembla nous ouvrir l’entrée de Bals-Fiord ; mais, avant d’y emboucher, un calme soudain nous prit, et, nous laissant à la merci du courant, faillit à faire échouer notre vaisseau contre les rochers de Kokernen. Heureusement, comme nous n’étions plus qu’à deux portées de fusil de cet écueil, un vent nous éloigna de la côte, et nous remit en pleine mer. Enfin nous arrivâmes à Neu-Herrnhut onze semaines après être partis de Copenhague.

» Dès le 3 et le 4 d’août nous vîmes arriver à la mission beaucoup de Sud-Landais ou sauvages méridionaux ; mais ils n’avaient pas la moindre idée de religion. Ils venaient dans nos chambres nous parler de la beauté de leur pays, en nous invitant à les y suivre. Voulions-nous les entretenir du bonheur des croyans, ils répondaient qu’ils n’entendaient rien aux discours des Européens, et que l’immortalité de l’âme, les noms de Créateur et de Sauveur, étaient pour eux des mots incompréhensibles.