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en Europe le nombre des prosélytes du herrnhutisme, il doit craindre de diminuer encore davantage celui des vrais croyans. Que fait-il, si ce n’est démolir le temple auguste de la religion pour bâtir des autels aux idoles de son imagination ? Foulons en passant toutes les chimères des herrnhuters, et ne recueillons dans les légendes de leurs missions que ce qui s’y trouvera d’instructif ou de curieux pour l’esprit humain.

On y verra cette année une terreur panique. Elle fut répandue par un Groënlandais de la baie de Disko, qui avait fait un voyage en Hollande avec un pêcheur de baleine. Revenu dans son pays, il y sema le bruit qu’au printemps suivant il devait y venir une flotte pour exterminer les Européens et les nationaux qui se trouveraient mêlés avec eux. Cette fausse alarme fit déserter les Groënlandais du voisinage des missions. Vingt bateaux des habitans du sud retournèrent aussitôt vers la côte, avec tous les pêcheurs établis à Kanghek. Ainsi ce peuple était le jouet de toutes les erreurs qu’on lui débitait.

Les angekoks profitaient de ces désertions pour rétablir leur empire ; et quand ils ne pouvaient pas désabuser les esprits des prestiges du herrnhutisme, ils venaient étudier cet art de séduction pour en renforcer leurs artifices. Un angekok, chaque peuplade a le sien ; celles qui ne sont pas assez riches ou assez nombreuses pour en entretenir un de ces devins sont