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voyer dans leur pays. La fille mourut dans la traversée, et le garçon arriva sain et sauf, du moins en apparence ; mais il apportait de l’Europe un venin caché dans ses veines, et qui ne tarda pas à se manifester par une éruption cutanée, où l’on n’aperçut d’abord aucun danger. Il continua de courir et de jouer avec ses camarades qu’il infestait cependant de la contagion. Lui-même en mourut le premier au mois de septembre ; c’était l’année 1733. Celui qui le suivit de plus près au tombeau fut le jeune Frédéric Christian, dont Égède avait fait un excellent catéchiste, et qu’il regretta comme un sujet très-utile à la mission. Enfin on découvrit, par un malade de la colonie, que cette peste était la petite vérole. Aussitôt Égède dépêcha un exprès dans tous les pays pour avertir les Groënlandais de ne pas sortir de leurs habitations, s’ils ne voulaient pas gagner et répandre la peste européenne ; et de n’y laisser entrer aucun vagabond du voisinage, qui ne manquerait pas de la leur apporter. Mais ces avis furent inutiles dans un pays ouvert et libre, où l’on ne peut empêcher personne d’aller et de venir à son gré.

La contagion fit les progrès les plus rapides, et d’autant plus violens, que le froid du climat et le peu de précaution des habitans rendaient l’éruption du venin plus difficile. Les malades souffraient des tourmens incroyables, et la chaleur de leur température, jointe à une soif brûlante qu’ils ne savaient apaiser qu’avec de