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de cris. Le 20, lorsqu’on retourna au vaisseau pour transporter toute la bière qui restait, on trouva que la gelée avait fait fendre une partie des tonneaux, sans excepter ceux qui avaient des cercles de fer, dont plusieurs s’étaient rompus. Tout le reste de l’équipage passa dans la hutte, avec la précaution d’y traîner la chaloupe du vaisseau, et l’ancre de toue, pour les besoins plus pressans encore, dont il n’est pas surprenant qu’ils se crussent menacés. Le soleil, dont la vue était leur unique bien, commençant à les abandonner, ils firent jusqu’au 25 des efforts extraordinaires pour transporter sur leurs traîneaux tous les vivres et les agrès.

Ils étaient encore occupés de ce pénible travail, lorsque Barentz, levant les yeux, vit derrière le vaisseau trois ours qui s’avançaient vers les matelots. Il fit de grands cris dont ils comprirent le sens, et qu’ils secondèrent aussitôt ; mais les trois monstres, que leur nombre rendait apparemment plus hardis, n’en parurent pas effrayés. Alors tous les matelots cherchèrent à se défendre. Il se trouva heureusement sur un traîneau deux hallebardes, dont Barentz prit l’une, et Gérard de Veer l’autre. Les matelots coururent au vaisseau ; mais, en passant sur la glace, un d’entre eux tomba dans une fente. Cet accident fit trembler pour lui, et l’on ne douta point qu’il ne fût le premier dévoré. Cependant les ours suivirent ceux qui couraient au vaisseau ; d’un autre côté, Barentz et de Veer en firent le tour pour entrer