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Cependant, les glaces s’étant séparées le jour suivant, et les glaçons commençant à flotter, on admira la pesanteur du grand banc, que les autres heurtaient sans pouvoir l’ébranler. Mais, dans la crainte de demeurer pris au milieu de tant de masses, Barentz se hâta de quitter ce parage. Le péril était déjà pressant, puisqu’en marchant, le vaisseau faisait craquer la glace bien loin autour de lui. Enfin l’on s’approcha d’un autre banc, où l’on porta vite une ancre pour s’y amarrer jusqu’au soir. Après midi, les glaces recommencèrent à se rompre avec un bruit si terrible, que l’auteur n’entreprend pas de l’exprimer. Le vaisseau avait le cap au courant qui charriait des glaçons ; il fallut filer du câble pour se retirer. On compta plus de quatre cents gros bancs de glace qui étaient enfoncés de dix brasses dans l’eau, et qui n’avaient que deux brasses de hauteur au-dessus. Comme le seul parti était de s’amarrer de banc en banc, on en vit un dont le haut s’élevait en pointe, avec l’apparence d’un clocher ; et, s’y étant avancé, on lui trouva trente-deux brasses de hauteur, vingt dans l’eau, et douze au-dessus. Le 11, on s’approcha d’un autre qui avait dix-huit brasses de profondeur, et dix au-dessus de l’eau. Le 12, Barentz crut devoir employer toutes sortes d’efforts pour s’avancer vers la côte. Non-seulement il craignait d’être emporté par les glaces, mais il jugea que, lorsqu’il serait une fois sur quatre ou cinq brasses d’eau, les plus gros bancs ne