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autre sous le nez, pour représenter la bouche. De petits tas de cendres et d’ossemens qu’on remarquait devant elles firent connaître que les Samoïèdes leur faisaient des sacrifices.

Les Hollandais ayant remis à la voile le 2 septembre vers six heures du matin, se trouvèrent deux heures après à la distance d’une lieue de Twisthoek, à l’est de ce cap ; et, courant au nord jusqu’à midi, ils firent environ six lieues. Ensuite ils rencontrèrent tant de glaces, une brume si noire, et des vents si variables, qu’après avoir été contraints de faire de petites bordées, ils prirent le parti de dériver à l’est d’une île, qu’ils nommèrent l’île des États. Ils y descendirent, attirés par la vue d’une multitude de lièvres, dont ils tuèrent un grand nombre ; mais cet amusement fut suivi d’une scène si terrible, que, pour n’en supprimer aucune circonstance, elle doit être représentée dans le style naïf du voyageur.

« Le 6 septembre, dit Gérard de Veer, quelques matelots retournèrent à l’île des États pour y chercher une sorte de pierres cristallines, dont ils avaient déjà recueilli quelques-unes. Pendant cette recherche, deux de ces matelots étant couchés l’un auprès de l’autre, un ours blanc fort maigre s’approcha doucement d’eux, et saisit l’un par la nuque du cou. Le matelot ne se défiant de rien, s’écria : Qui est-ce qui me prend ainsi par derrière ? Son compagnon, qui tourna la tête, lui dit : Oh ! mon cher ami, c’est un ours ; et se levant vite,