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qu’on puisse la rendre, jusqu’à pouvoir servir à faire des vestes et des hauts-de-chausses, elle est toujours si forte, qu’on la croit à l’épreuve des coups de feu. Il s’en trouve de huit pieds de long sur neuf de large ; et rien n’est, dit-on, d’un meilleur usage pour couvrir les impériales de carrosses.

Les morues, dont cette partie de l’Océan est comme l’empire naturel, sont des poissons trop connus pour demander une description. Fixons-nous à quelques remarques sur leurs principales propriétés. Tout est bon dans une morue fraîche : elle ne perd même rien de sa bonté ; elle devient seulement un peu plus ferme après avoir été deux jours dans le sel : mais les pêcheurs seuls mangent ce qu’elle a de plus fin, c’est-à-dire, la tête, la langue et le foie, qui, délayés dans l’huile et le vinaigre avec un peu de poivre, lui font une sauce exquise. Comme il faudrait trop de sel pour conserver toutes ces parties, on jette à la mer ce qui n’en peut être consommé dans le temps de la pêche. Les plus grandes morues n’ont pas plus de trois pieds ; et celles du grand banc sont les plus fortes. Il n’y a peut-être point d’animal qui ait la gueule plus large, ni qui soit plus vorace à proportion de sa grandeur. Il dévore tout, jusqu’à des têts de pots cassés, du fer et du verre. On a cru long-temps qu’il les digérait, mais on est revenu de cette erreur, qui n’était fondée que sur ce qu’on lui avait trouvé dans le corps des morceaux de fer à demi usés. Per-