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sentir aux deux équipages ce qu’ils avaient à craindre de la part du gouverneur. Dès le jour suivant il joignit les menaces à la perfidie. Ensuite, voyant qu’elles ne servaient qu’à faire abandonner aux deux vaisseaux le dessein d’hiverner au port de Nelson, et qu’ils paraissaient chercher un autre poste dans la rivière des Haies, il revint à l’artifice. « Tout fut employé, dit Ellis, pour nous persuader de mettre nos vaisseaux au-dessous du fort dans un lieu ouvert à la mer, où, suivant toute apparence, ils auraient été bientôt mis en pièces par les flots ou par les glaces. Il était si résolu de nous faire périr, qu’après avoir vu ses propositions rejetées, il envoya bien loin dans les terres tous les Indiens du pays dont la principale occupation est de tuer et de vendre des bêtes fauves et des oies pour nous priver inhumainement de ce secours. »

Malgré l’appréhension d’un triste avenir, les deux vaisseaux remontèrent la rivière des Haies le 3 septembre, et cherchèrent une anse pour s’y mettre à couvert. Ils en trouvèrent une cinq lieues au-dessus du fort d’York. Le temps fut employé jusqu’au 12 à les décharger. On commença par creuser un grand trou en terre, pour y garantir de la gelée la bière et les autres liqueurs ; ensuite, dans l’impossibilité de passer l’hiver à bord, chacun s’occupa de tout ce qui regardait sa conservation. Ces exemples de l’industrie humaine font toujours une peinture intéressante.