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dès le jour suivant ; mais un vent de mer jeta sur la côte quantité de débris, entre lesquels il se trouva quelques tonneaux d’eau-de-vie et de farine, secours qui fut regardé comme une faveur du ciel. En effet, il servit pendant quelques jours à soutenir l’espérance des Anglais ; mais la seule qui pût leur rester était de revoir la pinque, qui pouvait s’être brisée comme eux. Dans le doute, Wood ne pensa qu’à sauver le plus de monde qu’il lui serait possible. « Je résolus, dit-il, de hausser de deux pieds la chaloupe, et d’y faire un pont des débris que nous avions rassemblés pour nous approcher de la Russie à voiles et à rames ; mais comme elle ne pouvait contenir que trente hommes, de soixante-dix que nous étions encore, la plupart furent alarmés de mon dessein, et quelques-uns complotèrent de la mettre en pièces pour courir tous la même fortune. Ils me proposaient d’entreprendre le voyage par terre ; je leur représentai que les provisions nous manquaient pour une si longue route, ainsi que les munitions pour nous défendre des bêtes féroces, et qu’avec ces secours même, s’ils nous étaient descendus du ciel, nous ne pouvions espérer de vaincre les difficultés du chemin, telles que des montagnes et des vallées inaccessibles, sans compter un grand nombre de rivières qui nous arrêteraient à chaque pas. Ainsi la terre et la mer nous refusaient également le passage ; et pour comble de malheur, le temps était si mauvais, que