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ment ; mais ils se retrouvèrent bientôt pris dans les glaces sans aucune apparence d’ouverture pour en sortir ; ce qui leur fit conclure qu’ils étaient à l’entrée du Weigats, et que le vent de nord-ouest avait poussé les glaces dans le golfe. Il ne s’offrait pas d’autre parti que de retourner aux deux îles. Le 31, ils abordèrent à l’une, où la vue de deux croix leur fit espérer de trouver des hommes. Elle était déserte. Cependant ils ne regrettèrent point leurs peines en y découvrant quantité de cochléaria, herbe qu’ils désiraient ardemment, parce que la plupart étaient fort incommodés du scorbut. Ils en mangèrent à pleines mains ; et l’effet en fut si prompt, que, dans l’espace de deux jours, ils se trouvèrent tous rétablis.

Le 3 août, ils se déterminèrent à passer droit en Russie ; et dans ce dessein, qu’ils jugèrent propre à finir tout d’un coup leur misère, ils mirent le cap au sud-sud-ouest ; mais, après avoir suivi cette route jusqu’à six heures du matin, ils se retrouvèrent au milieu des glaces, nouvelle source de désespoir pour des malheureux qui s’en croyaient tout-à-fait délivrés, et qui n’avaient pris leur dernière résolution que dans cette vue. Le calme, qui dura quelques heures, leur faisant craindre de demeurer pris, ils n’eurent point d’autre ressource qu’un mortel travail pour se tirer à force de rames. Vers trois heures après midi, ils se virent en haute mer ; et jusqu’à neuf