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nombre de ces inconnus, qui n’étaient pas moins de trente, et qui pouvaient être des sauvages ou des ennemis de leur nation. Ils ne laissèrent pas de s’en approcher. C’étaient des Russes, qui s’avancèrent vers eux sans armes, et qui, jugeant de leur infortune à la première vue, les regardèrent d’abord d’un œil d’étonnement et de compassion. Bientôt ils reconnurent quelques Hollandais qu’ils avaient vus au voyage précédent ; quelques-uns d’entre eux vinrent frapper sur l’épaule de Gérard de Veer et d’un autre pour leur faire entendre qu’ils croyaient les avoir déjà vus ; et c’étaient effectivement les seuls qui eussent fait le second voyage. Ils leur demandèrent ce qu’était devenu leur vaisseau, ou du moins c’est ce que les Hollandais crurent entendre à leur langage ; et, n’ayant point d’interprète, ils leur firent comprendre aussi qu’ils avaient perdu un beau navire, qui avait fait leur admiration. Les civilités ne discontinuèrent point pendant le reste du jour ; mais le 29, au matin, les Russes appareillèrent pour mettre à la voile, et portèrent à bord quelques tonnes d’huile de baleine. Un départ si brusque alarma beaucoup les Hollandais, qui n’avaient pu tirer d’eux aucune lumière. Ils prirent la résolution de les suivre. Malheureusement le temps était si sombre, qu’ils les perdirent de vue. Ce cruel obstacle ne les empêcha point de continuer leur route. Ils s’engagèrent dans un canal, entre deux îles, et le passèrent assez facile-