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moins, celles qu’on crut voir encore ne causèrent plus d’épouvante. On fit route avec un si bon vent, que l’on ne parcourait pas moins de dix-huit lieues en vingt-quatre heures. Le 20, à neuf heures du matin, le cap Noir fut doublé ; et vers six heures du soir on reconnut l’île de l’Amirauté, qui fut dépassée pendant la nuit. En approchant de cette île, les Hollandais des deux bâtimens virent environ deux cents morses qui semblaient y paître, et se firent un amusement de les chasser ; bravade qu’ils reconnurent bientôt pour une imprudence. Cette fière légion de monstres, dont la force est extraordinaire, se mit à nager vers eux, comme dans le dessein concerté de se venger, et firent un bruit terrible, qui semblait les menacer de leur perte. Ils ne se crurent redevables de leur salut qu’à la faveur d’un bon vent.

Le 22, se trouvant proche du Kandenos, ils descendirent plusieurs fois à terre pour chercher des œufs et des oiseaux. Les nids y étaient en abondance, mais dans des lieux fort escarpés. Les oiseaux ne paraissaient point effrayés de la vue des hommes, et la plupart se laissaient prendre à la main. Chaque nid n’avait qu’un œuf, qu’on trouvait à terre, sur la roche, sans paille et sans plumes pour l’échauffer ; spectacle étonnant pour les Hollandais, qui ne comprirent point comment ces œufs pouvaient être couvés, et les petits éclore dans un si grand froid.

À peine eurent-ils remis à la voile pour s’é-